Tandis que je m'apprête à visionner un énième film de zombies, je réfléchissais encore une fois à l'omniprésence des morts-vivants ces dernières années, tant au cinéma que dans la littérature. Bien sûr, ce n'est en rien une nouveauté, mais la popularité des zombies me semble révélatrice, et il y aurait, il me semble, toute une réflexion à faire au sujet du rapport à la mort et à la putréfaction comme tabou sociétaire et de son expression artistique, qui fait en quelque sorte figure d'exutoire collectif. Mais plutôt que de me perdre en longues tergiversations, j'ai plutôt pensé dire quelques mots sur les "transis" (terme issu de l'expression "transi de vie", soit "trépassé"), ces sculptures funéraires qui représentaient des cadavres décomposés. Tradition qui s'est perdue à notre époque, les transis sont apparus au XIVe siècle, avec par exemple la représentation de Guillaume de Harcigny.
Même la royauté n'a pas échappé à cet engouement, plusieurs rois et reines se retrouvant immortalisés comme transis, dont Louis XII et Anne de Bretagne.
Même la royauté n'a pas échappé à cet engouement, plusieurs rois et reines se retrouvant immortalisés comme transis, dont Louis XII et Anne de Bretagne.
Catherine de Médicis et Henri II se sont également prêtés au jeu, en faisant réaliser d'eux la représentation ci-dessous, à l'altération des chairs beaucoup plus subtile que chez Louis XII et Anne de Bretagne, tout de même.
Au total, il existe environ 260 transis, majoritairement réalisés au cours du XVIIe siècle.
Question des plus philosophiques que la mort, la plus philosophique d'entre toutes selon Jankélévitch, qui écrivait dans son essai La mort que "si la mort n'est pensable ni avant, ni pendant, ni après, quand pourrons-nous la penser" ? En ce sens, zombies et transis sont le reflet de ces questionnements, de cette difficulté à admettre l'inévitable décomposition des organes...
Salut Ariane,
RépondreSupprimermerci de m'éduquer et de participer activement à l'étendue de mes connaissances générales, j'ignorais totalement l'existence de pareilles oeuvres d'arts.
Tu connais surement aussi la naissance des légendes sur les premiers mort-vivants, les "ghoules" en fait, où l'on déterrait les cadavres qu'on croyait être susceptibles d'avoir fait un pacte avec le diable et lorsqu'on les piquait avec un pieu dans le coeurs, un sifflement émanait par la bouche en relachant les gaz comprimées à l'intérieur du thorax. Ce qui prouvait bel et bien qu'ils étaient toujours vivant! ;)
Bref, fascinant ton billet, ça porte à réfléchir...
De plus, il y a un véritable culte de la mort qui a lieu dans la culture. Regarde simplement les effigies des crânes ou d'ossements sur les vêtements tant à la mode ou sur les pochettes d'albums, etc.
Il faut croire que notre propre finitude nous obsède, nous simple mortel.
Billet très intéressant! Il présente une image sympathique de la mort. Pourtant, je ne peux m'empêcher de remettre en doute l'affirmation finale liée à Jankélévitch. Mon petit côté épicurien me travaille à chaque fois que j'entends parler de la mort. Sans dire que la question de la mort n'est pas importante, il la relègue à un simple problème de priorité et discarte le tout dans une très belle formule : « Le plus effrayant des maux, la mort ne nous est rien, disais-je : quand nous sommes, la mort n’est pas là, et quand la mort est là, c’est nous qui ne sommes pas ! »
RépondreSupprimerJe dois dire aussi que j'aime le lien constant que tu entretiens dans ton blogue avec les oeuvres d'arts! C'est vraiment inspirant!
RépondreSupprimerTrès beau texte ! Mais un peu déprimant...
RépondreSupprimerEst-ce des réflexions que tu partages au quotidien, avec ton copain ? Comment vit-il ça ?
Je pose la question, parce que je me suis toujours dit que de sortir avec une thanatologue (dans ton cas, des mots !), ça doit être particulier !
Luc : Mais mon copain, je l'ai depuis longtemps disséqué ! Blague à part, je n'aime heureusement pas que les trucs morbides, ce qui contribue à me rendre un peu plus sympathique, tout de même. Parce qu'au quotidien, je te rassure, je suis beaucoup moins "thanatologue" que par écrit ;)
RépondreSupprimerCela dit, merci à toi ainsi qu'à Alamo et Gabriel pour vos très pertinents commentaires !
Délicieuses images. Ça m'a fait penser aux cires anatomiques de La Specola, à Florence.
RépondreSupprimerIntéressant. J'ignorais l'existence des transis, mais la chronologie que tu en donnes correspond à l'apogée du thème de la danse macabre, tant en poésie que dans les représentations picturales.
RépondreSupprimerJ'en ai déjà discuté sur mon blogue, en concluant par un lien avec les histoires de zombis, justement:
http://aigueau.wordpress.com/2009/07/24/la-danse-macabre/
Fascinant! J'avais déjà contemplé de tels gisants en décomposition (à la basilique de Saint-Denis, près de Paris, il me semble), mais j'ignorais qu'ils avaient un nom — et j'ignorais qu'on avait poussé aussi loin la sculpture du dépérissement et du pourrissement. (Ou je l'avais oublié...)
RépondreSupprimerEffectivement, ces transis sont fascinants ! J'espère en tout cas avoir l'occasion d'en détailler en personne lors de mon prochain voyage en Europe (ce qui ne sera pas avant longtemps, mais enfin...)
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