dimanche 28 juin 2015

Entre les murs salpêtrés, verdâtres et fendus

Hormis quelques visites dispersées de villages fantômes et de maisons abandonnées, il y avait un moment que je n'avais pas eu l'occasion de faire une exploration de ruines digne de ce nom, passant plusieurs heures à errer, appareil photo à la main, parmi les gravats et les vestiges rongés par la corrosion (la dernière visite intéressante était détaillée ici). 

L'occasion s'est enfin présentée en fin de semaine, en compagnie de Frédérick et d'amis fervents d'exploration. Nous avons donc observé les "murs salpêtrés, verdâtres et fendus (qui) répandaient une si forte humidité" - la citation est de Balzac) d'un lieu dont vous me permettrez de taire le nom... Conservant ainsi le mystère qui plane sur ses décombres... même hantées par la Mort dans sa soutane, comme vous le verrez ! Ce qui est certain, c'est que je n'attendrai pas trop pour fréquenter à nouveau l'un de ces endroits en suspens hors du temps (surtout en aussi bonne compagnie), où l'abandon inscrit petit à petit ses cicatrices...

(Photos de Frédérick et de moi)
Bienvenue...

 La Mort se cache sur l'image plus bas... Saurez-vous la voir ?
 Décombres qui se reflètent dans une mare...
Entrons dans le bâtiment...











 Escalier qui descendait vers les ténèbres... Rarement ai-je eu aussi viscéralement peur de toute ma vie. Très instructif, pour une auteure d'épouvante. Un extrait de la plongée :
Quelqu'un nous accompagne ?
Prochaine destination : le village fantôme de Gagnon (dont il ne reste, semble-t-il, pas grand chose...)

jeudi 25 juin 2015

Du fétichisme des périodiques : Clair/obscur no 13


Clair/obscur no 13, hiver 2015, 78 p.

Sous l’égide de l’ancienne équipe, Clair/obscur avait un rythme de parution le plus souvent annuel. Avec ce deuxième numéro édité en quatre mois, le nouveau comité de rédaction semble déterminé à adopter une cadence plus soutenue. Les lecteurs ne vont certainement pas se plaindre de ce plus récent opus du fanzine, qui dénombre cette fois 78 pages plutôt que 100 (signe que la revue se cherche peut-être encore un peu du côté des contenus, ce qui est compréhensible, puisque l’équipe d’Anne-Marie Bouthillier n’en est qu’à son second essai). 

En ce qui a trait aux remarques générales, soulignons une amélioration globale de la mise en page, même si quelques coquilles subsistent. Un élément présent dans le no 12 et dans celui-ci serait également à corriger : éviter les lignes blanches entre chaque paragraphe, qui, dans une publication imprimée, donnent un caractère amateur (ce à quoi j’ajouterai que la police utilisée est un peu trop petite, et que les paragraphes devraient commencer par des alinéas). Mais mettons de côté ces détails imputables au perfectionnisme, et intéressons-nous au sommaire de ce Clair/obscur hivernal, qui, comme vous allez le voir (brrr), nous convie à une plongée en eaux froides!

Les nouvelles sont en effet regroupées autour de la thématique « Terreurs et mystères océaniques », sujet qui a sans contredit fortement inspiré les quatre auteurs au sommaire : Frédéric Gaillard, Sylvain Johnson, Sébastien Chartrand et Élise Lucie Henripin. En guise de complément à cette incursion dans les inquiétants abysses, Anne-Marie Bouthillier nous offre un intrigant « Bestiaire aquatique » tandis que Mathieu Couture a eu la bonne idée d’analyser la noyade dans les jeux vidéo (peut-être d’ailleurs que l’ensemble des articles de la partie rédactionnelle aurait pu être rattaché au thème des menaces sous-marines?). Quoi qu’il en soit, chez les auteurs de fiction, le sujet imposé ne fait pas figure de « pièce rapportée » et s’est avéré inspirant.

Coup de cœur de mon côté pour « Nécronomignon », de Frédéric Gaillard, qui, en dépit d’une trame narrative quelque peu classique, réussit, entre autres par la force d’évocation de sa plume, à créer un univers et une histoire immersifs : « Je ne sais combien de temps je restai ainsi, inerte, balloté par les courants, insignifiant jouet tombé entre les mains d’un Neptune chahuteur ». Les malheurs de Nicolas, surnommé « Nécronomignon » à cause de ses déformations labiales, sont ainsi poignants (et comme le récit est long, à l’instar de presque tous les textes au sommaire, les mésaventures de l’enfant sont d’autant plus prenantes).

« La petite fille au tonneau », nouvelle de Sylvain Johnson, aborde quant à elle le thème à partir d’une figure monstrueuse bien connue, qui prend d’assaut un navire... puis les berges du continent. Nous avons ici un récit amusant, bien que très (trop?) prévisible (il se termine notamment avec le mot « Faim » dégoulinant, trop souvent usité depuis la mode de vous-savez-quoi). L’écriture de Johnson n’est pas toujours juste, desservie par du telling : « L’horreur n’avait plus de fin / L’effroi était sa nouvelle réalité » et des imprécisions : « Son poing s’écrasa contre le petit visage [...] provoquant des craquements malsains ». Bref, une nouvelle à lire sans trop s’attarder aux détails (mais vous savez, moi, les détails...).

La troisième nouvelle, « Souvenirs de Miguasha » de Sébastien Chartrand, entre dans l’horreur de manière plus intimiste. Alliant zoophilie (marine, bien entendu, avec des pinces, oui) et personnages tourmentés, l’auteur parvient à dépeindre l’ambigüité d’une relation mère/fils – et par extension père/fille – de façon originale. Dommage que la fin, un peu expédiée, demande une relecture afin d’en saisir toute la portée. J’aurais en outre souhaité que le jeu sur l’hésitation fantastique/les traumatismes psychologiques de Julie soit plus accentué. Mais, dans l’ensemble, l’effet produit est réussi.

Élise Lucie Henripin, avec « Baptême », s’inscrit dans la continuité du texte précédent. Dépourvu de dialogues, sa nouvelle à l’atmosphère poétique nous convie à nous immerger dans les immensités aquatiques... non dénuées de menaces, nous sommes dans Clair /obscur, ne l’oublions pas! Une jeune auteure à suivre, en définitive.

Du côté rédactionnel, surtout rassemblé à la fin du périodique (j’aimais cette idée peu usitée d’intercaler les articles entre les fictions, je m’en rends compte), nous retrouvons notamment l’instructive chronique « Incursion dans la bibliothèque de... », cette fois en compagnie d’Yvan Godbout. Sans oublier des commentaires de lecture (dont celui de Terreur Blanche de Dan Simmons, directement – et sinistrement – rattaché au thème de ce numéro), signés par les contributeurs passionnés de la revue (dont Pierre-Alexandre Bonin, qui est partout!). Des chroniques cinéma, arts visuels et jeux vidéo complètent cette treizième édition du magazine.

Si je ne vous ai pas convaincu de vous abonner au périodique, il est encore temps de le faire : après tout, Clair/obscur s’annonce sous les plus beaux augures fanzinesques. Comme les revues alliant horreur et imaginaire québécois sont rares, il faut d’autant plus les chérir... Sans compter que, si j’étais à votre place – ce n’est pas pour rien que je déteste la baignade –, j’en profiterais pour en apprendre davantage sur les créatures qui peuplent océans et lacs avant votre prochain passage sur la plage... Du moins, si vous voulez rester entier!


- Cette critique est parue précédemment dans le numéro 41 de Brins d'éternité.

lundi 15 juin 2015

Une fin de semaine en Jamésie

Au cours de la fin de semaine dernière, j'ai eu la chance de me joindre à un groupe de voyageurs qui allait passer deux jours à la Baie-James, plus spécifiquement dans les environs de Radisson. Il faut être sur place pour mesurer l'ampleur des chantiers hydroélectriques, qui ont considérablement modifié l'endroit, peu occupé par rapport à sa superficie. Pas étonnant que l'on parle parfois d'un "pays de géants"... (vous remarquerez également l'intense luminosité et la température clémente... il faisait effectivement 20 degrés en moyenne  !) 

En tout cas, le dépaysement, plus de 1000 kilomètres au nord de Trois-Rivières, est particulièrement perceptible. Quelle belle atmosphère j'ai rencontrée au nord du 53e parallèle ! Atmosphère que les appareils photo peinent à saisir (surtout avec un modèle limité comme le mien). Mais j'ai tenté modestement de capturer les panoramas saisissants de cette communauté surprenante qu'est Radisson et, au sens large, de cette région qu'est la Jamésie :
Route de la Baie-James vue des airs, sur laquelle un unique camion est visible. À droite, la ligne de transport hydroélectrique qui descend plus de 1000 kilomètres au sud, se frayant un passage entre lacs, tourbières et arbres chétifs...

Ma traditionnelle photo de lever de soleil, cette fois sur Radisson, "constellation du Nord" :
Population : 270 habitants... + des travailleurs de passage
Rue typique de Radisson (les maisons du village sont très similaires)
Réservoir de la centrale Robert-Bourassa
Évacuateur de crues... Centrale Robert-Bourassa, vue d'en haut
Et d'en bas. Beaucoup de pissenlits, sans doute venus du sud, recouvraient les tapis d'herbes et de lichen.
Parc Robert-A. Boyd, où se trouve une reconstitution de l'ancien campement d'exploration G-68. Le site a été construit en hommage aux pionniers.
Et le barrage La Grande-1, impressionnant :
Vous aimeriez en voir davantage ? L'album est juste là.


mardi 9 juin 2015

25 ans plus tard

Cette fois, ça y est : me voilà (enfin) dans la dernière ligne droite de la rédaction de ma thèse, alias "le grand ermitage". Plus qu'un an, normalement, avant le dépôt initial. La partie création étant complétée (je ne crois pas que je me serais lancée dans un projet de cette envergure si je n'avais pu lui adjoindre un angle créatif), nous visons, ma directrice et moi, de finaliser la section théorique d'ici l'été prochain. Je dois admettre que je commence à avoir hâte de me délester de mon statut d'étudiante, qui m'accompagne depuis 25 ans (d'accord, 26, mais 25, c'est moins cruel à écrire). Mais, en attendant, voici une bande dessinée de PhD qui résume tout à fait ma situation à venir au cours des douze prochains mois :


Souhaitez-moi du courage ! (bon, j'avoue que j'exagère un peu : je ne serai pas que dans les ouvrages théoriques, j'ai tout de même les corrections d'un roman à finir. Et vous me connaissez, quand ça manque trop de fantaisie... Une photo de la Baie-James pour contrebalancer tout ça, quelques jours avant, justement, mon départ pour là-bas : )


mercredi 3 juin 2015

Hommage à Joël

Sur le coup, je suis restée sans voix, bien que les détails de son combat contre la maladie étaient connus depuis un moment. Puis il y a eu les larmes. Et les souvenirs, abondants. Des congrès Boréal. Des repas partagés pendant les salons du livre. Des promenades à Saint-Séverin avec les chiens... Des visites de marché aux puces. Des lectures de ses romans, dont la grande diversité des genres abordés, toujours avec talent, n'a jamais cessé de m'impressionner. La direction littéraire, aussi, de mon tout premier texte professionnel, publié en 2008 dans le numéro 168 de Solaris. Joël avait été le premier professionnel à croire en moi. Et il l'avait fait avec son incomparable générosité. En définitive, pour son talent littéraire et ses qualités humaines, peu de gens dans le milieu SFFQ faisaient autant l'unanimité que Joël, ce qui le rend d'autant plus irremplaçable. 

Joël, invité d'honneur du congrès Boréal

L'imaginaire québécois est en deuil... et Frédérick et moi n'oublierons jamais les beaux moments partagés avec Valérie et lui. Valérie à qui nous témoignons tout notre soutien en ces jours difficiles.

Si vous ne l'avez pas encore fait, lisez Joël. Laissez-le vous accompagner dans ses univers imaginaires qui font tellement de bien.

Frédérick et moi sommes heureux d'avoir pu te connaître, Joël.