samedi 7 décembre 2013

Le Voyage insolite (émission du 2 décembre)


Une maison de fumée / François Lévesque


Depuis 2008, François Lévesque publie un roman par année, la plupart aux éditions Alire. Une maison de fumée est donc son sixième livre en six ans, cet opus-ci ne s’inscrivant pas dans une série, contrairement à la trilogie « Les carnets de Francis », publiée entre 2009 et 2012. Peut-être vous rappelez-vous aussi de L’esprit de la meute (2011), une incursion assez intéressante de l’auteur dans le domaine du fantastique, que j’avais présentée l’an dernier au « Voyage insolite ». J’étais donc curieuse de découvrir cette nouvelle parution de François Lévesque, compte tenu de son titre énigmatique.

Comme dans ses romans précédents, Lévesque manie l’art du suspense, et le lecteur s’attache au sort des personnages. Cependant, puisque l’auteur remet en scène un jeune homme tourmenté au passé et à la mémoire troubles, tel qu'il le faisait dans ses récits précédents, le narrateur m’a moins convaincue, cette fois-ci. J’ai eu l’impression que Lévesque restait dans sa « zone de confort » avec le personnage de Dominic Chartier, policier au SPVM qui a oublié une grande partie de son enfance. Il faut dire que des drames se sont produits à Malacourt en 1982, dont un incendie qui a tué cruellement la mère de Dominic, enseignante aimée de sa communauté. Mais ce n’est pas tout : les villageois venaient de subir la disparition de deux fillettes, vraisemblablement enlevées et tuées par le directeur de l’école, pédophile. Ce dernier sera finalement condamné à la prison à perpétuité, et Dominic déménagera loin des lieux du drame. Mais une autre disparition de fillette le ramènera à Malacourt, vingt ans plus tard, et le policier fera enfin la lumière sur son passé...

D’emblée, je dois dire que l’amnésie presque totale de Dominic pendant 20 ans m’a laissée un peu perplexe, surtout le fait qu’il attende toutes ces années avant de chercher à comprendre ce qui s’est passé. En plus, comme les événements en question sont particulièrement dramatiques et que des sévices s’échelonnent sur plusieurs années, comme nous l’apprenons à la fin du livre, la défaillance quasi-complète de sa mémoire est difficile à admettre. Malgré la disparition de la troisième fillette, je me suis demandé pourquoi avoir attendu deux décennies avant de revenir au bercail. Mais j’ai décidé de jouer le jeu, le fonctionnement de la mémoire étant parfois énigmatique (notamment le processus du refoulement), même si j’ai trouvé que les révélations sur le passé du policier « tombaient souvent à point ».

Cela dit, le lecteur a quand même envie de savoir ce qu’a vécu Dominic et s’attache au sort des personnages secondaires, bien construits, dont Vincent, enquêteur à la Sûreté du Québec. Un bémol toutefois au sujet du style de Lévesque, qui aurait parfois gagné à être allégé, par exemple des phrases comme « la gardienne de ce dernier l’épiait sournoisement en feignant justement d’être plongée dans la lecture de la Bible » ou « Se félicitant probablement d’avoir choisi aussi judicieusement, Shana arqua les épaules en frémissant ». Mais dans l’ensemble, la lecture est fluide, et le rythme, constant.

Bref, Une maison de fumée est un roman sympathique, même si François Lévesque reste ici en terrain familier. Avis aux lecteurs qui aiment les récits policiers introspectifs et tourmentés.

2 commentaires:

  1. Je ne suis pas particulièrement attiré par le style de F.Levesque, justement à cause, comme vous, des bémols qui alourdissent ses récits.

    RépondreSupprimer
  2. Et comme le style est important pour créer des atmosphères noires à souhait... Cela dit, je suis certaine que, s'il le souhait, François Lévesque pourrait perfectionner son style dans ses prochains livres... Et ses histoires (déjà intéressantes) s'en trouveraient forcément enrichies, plus immersives :)
    Merci de votre passage ici, Jacques !

    RépondreSupprimer