vendredi 11 décembre 2015

Le Voyage insolite (émission du 7 décembre)


Éric Gauthier, La grande mort de Mononc’ Morbide, Alire, 2015, 526 p.

La grande mort de Mononc’ Morbide est le cinquième livre d’Éric Gauthier. À ce jour, l’auteur a publié trois romans et deux recueils de contes. Fervent de fantastique, Éric Gauthier aime proposer des récits qui allient son genre de prédilection à la fantasy urbaine. Son dernier ouvrage est à cette image, les villes de Sherbrooke et de Montréal se teintant d’étrangeté, voire d’une touche de magie.

La couverture éclatée du roman représente bien la folie créatrice qui anime Élise Lépine, l’héroïne du livre. Malchanceuse depuis toujours, à l’instar de plusieurs membres de sa famille, Élise croit que le vent est en train de tourner. En effet, elle vient de se faire offrir de participer à la conception d’une fête privée, sous l’égide d’un très riche client. Toutefois, la jeune femme doit veiller à surprendre le millionnaire Pierre Daigle, qui en a vu d’autres. Élise ressent donc une certaine appréhension à l’idée de ce qui l’attend. Elle décide alors de quitter Montréal un moment, afin d’aller chercher l’inspiration à Sherbrooke auprès d’Edgar, son vieil oncle grincheux. Mais, entre-temps, Edgar, comédien déchu de l’émission pour enfants La maisonnée, s’est résolu à héberger un colocataire pour payer ses factures. Ce colocataire, Steve, se révèle bientôt obsédé par La maisonnée, de plus en plus obnubilé par l’idée de ramener Edgar sous les projecteurs, plus spécifiquement dans son rôle de Mononc’ Morbide. Mieux, Élise et lui pourraient lui donner un grand rôle dans la réception qu'organise la jeune femme. Car Edgar est âgé, et Steve croit qu’il doit préparer sa « sortie de scène » d’une manière mémorable.

Roman au fantastique minimaliste,  La grande mort de Mononc’ Morbide est un livre sympathique parsemé d’humour, qui se lit avec un sourire en coin. Les personnages, qu'il s'agisse d'Élise, d'Edgar ou de Steve, sont particulièrement réussis, leur psychologie étant finement dépeinte. Car, en fait, ce sont leurs interactions qui constituent le cœur de cet ouvrage. Les fervents de fantastique moins « modéré » pourraient donc demeurer sur leur faim, notamment en ce qui a trait au dénouement de l’intrigue. Pour ma part, j’ai aimé me laisser emporter par ces protagonistes réalistes à l’intérieur de cette aventure simple, narrée de manière fluide et rythmée (les 200 dernières pages contiennent néanmoins quelques longueurs... l’histoire totalise après tout 526 pages, ce qui est beaucoup).

Bref, Éric Gauthier nous offre, dans La grande mort de Mononc’ Morbide, un récit qui respire l’authenticité et l’humanité. Un roman qui s’intéresse au côté modeste, spontané de la vie. À l’image d’Élise, en somme.



Isabelle Lauzon et Nadine Bertholet, Allégeances (Clowns Vengeurs), Porte-Bonheur, 2015, 194 p.

Allégeances est le onzième « Clowns vengeurs » à paraître aux éditions Porte-bonheur. C’est également le deuxième titre de la nouvelle mouture de la collection, qui s’adresse désormais aux adultes, en plus des adolescents. Pour ce faire, la série propose notamment des ouvrages plus longs. C'est d'ailleurs la première fois dans la collection que deux auteures s’unissent afin de nous offrir un même roman. L’histoire se décline en deux parties assez différentes l’une de l’autre (ce qui laisse présager que chacune d’entre elles a été rédigée dans un premier temps par l’une des co-écrivaines). Le livre se présente sous une couverture assez réussie, qui allie science-fiction et esthétique gothique. D’emblée, nous sentons l’enthousiasme d’Isabelle Lauzon et de Nadine Bertholet, véritables érudites de l’univers des Clowns vengeurs.

Nous faisons d’abord la rencontre de Deloan, nouvelle recrue des menvatts. Contrairement à son frère Gayle, Deloan remet en question certaines des techniques de l’ordre, dont il interroge la pertinence. Bien des années plus tard, Deloan, devenu chef d’une importante section, aura à résoudre un cas particulier : celui d’Avner Lormax, un menvatt qui a engagé une adjointe singulière. En effet, Sinda, à l’époque où elle était enfant, a vu sa mère mourir au terme d’une poursuite mêlant menvatts et acurides. Fascinée par les menvatts et avide de vengeance envers les acurides, Sinda profitera du travail offert par Avner Lormax pour régler certains comptes personnels et familiaux. Jusqu’à ce que sa « fascination » dépasse les bornes...

Agréable à lire, Allégeances propose des personnages intéressants, au premier chef Sinda. La jeune adjointe est sans contredit le personnage-clef du livre. En ce sens, il est dommage que Sinda soit absente de la première partie du roman. La seconde partie, sans surprise, est la plus prenante, avec ses descriptions glauques et ses scènes d’action bien rythmées. 

En outre, la connaissance de l’univers des Odi-menvatts est bien intégrée dans l’ensemble d’Allégeances, qui est l’un des tomes de la série qui m’a paru le plus solide, réfléchi. Bref, nous sentons le soin qu’Isabelle Lauzon et Nadine Bertholet ont mis à rédiger cet opus. Opus qui fera passer un bon moment aux adeptes de sang noir !

2 commentaires:

  1. Sinda, une "adjointe", hein? On dirait que je devine qui a créé ce personnage! ;)

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