Kerfol et autres histoires de fantômes, Edith Wharton
Le livre de poche vient de rééditer l’un des recueils de nouvelles fantastiques de l’auteure Edith Wharton, Kerfol et autres histoires de fantômes. L’écrivaine, qui a vécu aux États-Unis de 1862 à 1937, a signé plusieurs romans, dont le plus connu est sans doute Le temps de l’innocence, une histoire d’amour qui se déroule dans le New York de 1870. Mais c’est avec les êtres surnaturels que Wharton est à mon avis le plus à l’aise, l’auteure possédant sans contredit du talent pour faire naître l’effroi avec grâce et subtilité.
« Kerfol », la nouvelle titre, est l’une des plus intéressantes. Elle nous raconte l’existence solitaire d’Anne de Barrigan, qui vit recluse à Kerfol, la riche demeure de son mari possessif. Comme unique plaisir, elle possède un petit chien, qu’elle finira par retrouver étranglé au pied de son lit. Par la suite, chaque fois qu’elle adoptera un nouvel animal et que son époux sera dans les parages, elle retrouvera la bête mystérieusement morte, peu de temps après. Mais les chiens ne se laisseront pas ainsi décimer et investiront la maison d’une manière bien particulière…
La nouvelle suivante « Les yeux », brode quant à elle autour d’un thème plus ou moins original : dans l’obscurité, un jeune homme se voit constamment épié. Ces épisodes, au cours desquels les yeux l’accompagnent, semblent liés à certains événements de sa vie… Dommage que la peur soit moins au rendez-vous ici, même si l’ensemble est agréable à lire.
« Ensorcelé » est pour sa part une nouvelle de fantômes assez classique. Saul Rutledge rencontre en effet régulièrement le fantôme d’Ora, l’une des filles de Sylvester Brand. Une nuit, il décide de suivre les traces de pieds nus que laisse la jeune femme dans la neige. Il se dirige ainsi vers leur lieu de rendez-vous : l’étang de Lamer… Mais pourquoi Ora revient-elle ? C’est ce que cette nouvelle, toute en nuances, nous apprendra…
Le quatrième texte du recueil s’intitule « Le miroir ». Narré sur un ton plus léger que les autres, il m’a beaucoup moins plu. Cette histoire nous raconte les malheurs de Madame Clingsland, qui ne supporte pas les ravages du temps. En effet, elle a été jadis une très jolie femme, et elle souhaite retrouver ses courtisans d’autrefois. Pour ce faire, elle se trouvera mêlée à un subterfuge compliqué, dans l’optique de renouer avec sa beauté d’antan.
Finalement, c’est le texte « Après coup » qui clôt le recueil. Dans cette nouvelle, Mary Boyne et son époux achètent une maison habitée par un fantôme (comme toute bonne vieille demeure anglaise). Ils sont d’ailleurs heureux de cette caractéristique, surtout Mary, qui voulait absolument que sa demeure recèle un fantôme. Seulement, celui-ci est d’origine un peu singulière : ceux qui l’aperçoivent ne constatent sa nature que longtemps après. C’est ce qui se produira dans ce texte, habile, qui aurait toutefois gagné à intensifier son aspect dramatique.
Pour résumer, Kerfol et autres histoires de fantômes saura plaire aux amateurs de fantastique éthéré, qui aiment les histoires subtiles et élégantes. En effet, il y a peu d’horreur au sens strict chez Wharton, l’auteure préférant miser sur les atmosphères. Alors, si ce type de fantastique vous plait, n’hésitez pas à découvrir cette écrivaine, qui sait comment faire surgir l’intangible.
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