jeudi 29 mai 2014

Lectures : Plaques chauffantes


Plaques chauffantes, Nécrorian, Rivière Blanche, 2012, 220 p.

Certains d’entre vous se souviennent peut-être de la collection Gore du Fleuve noir, reprise par la suite par Vaugirard, qui a eu ses heures de gloire entre 1985 et 1990. Nul doute que la collection aurait continué à s’enrichir de plusieurs titres si la censure ne s’en était pas mêlée à l'interne... L’un des arguments invoqués pour justifier l’arrêt de la collection, raconte justement François Darnaudet, le postfacier, n’était rien de moins que l’un des ouvrages de la collection : Blood-sex de Nécrorian, prétendument insoutenable. Pourtant, Blood-sex est à mon avis l’un des titres phares de Gore, réussissant à allier avec brio l’horreur, l’érotisme et la psychologie, par l’entremise de deux frères tanneurs qui n’inspirent pas particulièrement confiance. Comme Blood-sex m’est longtemps resté en mémoire (d’ailleurs, si vous l’apercevez en bouquinerie, n’hésitez pas à l’acheter, si vous affectionnez les récits intenses), je ne pouvais résister à un nouveau titre de Nécrorian, René-Charles Rey de son vrai nom, aussi connu sous le pseudonyme de Jean Mazarin.

Dans Plaques chauffantes, l’auteur reprend deux éléments importants de Blood-sex : le sexe et l’horreur. Cependant, le cadre science-fictif (nous sommes dans la France des années 3000) semble parfois accessoire. Nous suivons surtout Fab, un policier alcoolique, et son acolyte, Toussaint, qui tentent de capturer les meurtriers de deux femmes éventrées et écorchées vives. Mais l’enquête s’avère plus compliquée qu’elle ne le paraissait a priori : Lys (une ancienne amante de Fab devenue terroriste) rapplique, plongeant le policier dans la confusion. Autour d’eux gravite aussi une pléthore de personnages à la libido exacerbée, drogués aux pilules aphrodisiaques. Et pendant ce temps, de nouveaux crimes se profilent...

Avec Plaques chauffantes, Nécrorian propose un récit sympathique, bien que moins inspiré que son canonique Blood-sex. Outre l’invention de quelques gadgets, on se demande parfois pourquoi il a choisi un cadre SF, dans lequel on le sent moyennement à l’aise. Cela dit, le rythme du roman est bon, l’ouvrage est mené à fond de train et scindé en courts chapitres dans lesquels l’action abonde (et, de temps à autre, l’horreur). Nous retrouvons également cette audace érotique que possédait déjà Blood-sex, qui est la bienvenue ici. Néanmoins, Plaques chauffantes n’a pas l’aspect sanguin et incisif de son prédécesseur. Ce qui n’empêche pas que j’ai apprécié renouer avec Nécrorian, le temps d’une promenade sur les dalles chauffées à blanc (les fameuses plaques chauffantes !). Une remarque en terminant sur le nombre de coquilles, qui gêne un peu la lecture : avec sa professionnalisation de plus en plus marquée, il me semble important que l’équipe de Rivière blanche accorde plus de soin à la révision d’épreuves. Mais c’est déjà honorable que l’éditeur permette à tous ces titres d’exister et ça, surtout, c’est essentiel de le souligner.

- Cette critique est parue précédemment dans le no 35 de Brins d'éternité. D'ailleurs, la prévente de l'anthologie pour célébrer nos dix ans se poursuit (plus que trois semaines) !

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