Je sais que je ne devais pas animer cette saison-ci, mais j'ai fait une petite exception pour Un ménage rouge de Richard Sainte-Marie, que j'avais très hâte de lire (et dont je garde de bons souvenirs !).
Voici donc la chronique présentée à l'émisson de cette semaine :
Un ménage rouge
/ Richard Ste-Marie
L’automne
dernier, j’ai eu le plaisir de commenter L’Inaveu, un excellent
polar signé Richard Ste-Marie. Un second titre de cet auteur, intitulé Ménage
rouge, vient tout juste de paraître aux éditions Alire, dans une version
remaniée. J’avais donc particulièrement hâte de lire cette mouture, qui remet à
nouveau en scène Francis Pagliaro, l’inspecteur et personnage principal de L’Inaveu.
Cependant,
ce protagoniste n’est pas au premier plan dans Un ménage rouge, qui met
de l’avant Vincent Morin, un courtier en valeurs mobilières. Le récit démarre
sur une prémisse somme toute classique, lorsque l’homme découvre sa femme en
train de le tromper avec deux hommes. Profondément choqué, Vincent tue de sang
froid le trio, avant de songer aux conséquences de son acte. Il élabore alors
un plan qu’il juge infaillible pour se débarrasser des corps, mais surtout des traces
écarlates qu’ils ont laissées dans la chambre. Cette tâche effectuée, le courtier
deviendra de plus en plus obsédé par son « ménage rouge », craignant
d’avoir laissé des preuves de son crime derrière lui. Nous suivons donc sa
dérive psychologique suite à ce crime, dérive qui le mène aux « portes de
la folie ».
L’une
des forces de ce roman, tout comme L’Inaveu, est la maîtrise du suspense. Véritable « page-turner », Un ménage
rouge est narré avec brio, le lecteur se demandant sans cesse ce que le
récit lui réserve. Il faut dire que le livre est assez surprenant, dans sa
finale, par exemple, ou encore dans l’évolution de la psychologie du
personnage, qui n’emprunte pas des voies prévisibles (à l’exception de l'internement de Vincent, que l'on voit un peu venir). Cela dit, la difficulté majeure des récits criminels à saveur
psychologique, surtout lorsqu’ils mettent en scène des « gens ordinaires qui
commettent des meurtres inopinés », est le « point de bascule »,
c’est-à-dire ce moment crucial où ils commettent l’irréparable. Dans le cas
présent, la scène d’ouverture du récit, au cours de laquelle Vincent réalise sans trop de difficultés un triple homicide, ne m’a pas entièrement convaincue.
Il m’a semblé que les personnages adultères se défendaient trop faiblement, que
le courtier, qui est loin d’être un sportif, parvenait assez facilement à les
tuer (surtout qu’ils sont trois, dont un colosse...). Certes, l’adrénaline est
forcément présente dans un tel moment, mais le tout m’a semblé un peu trop aisé
pour Vincent. Néanmoins, la suite du roman est vraisemblable, et la psychologie
du criminel, détaillée avec soin.
Bref,
même si Un ménage rouge n’a pas la force de frappe de L’Inaveu, c’est assurément une
lecture sympathique, qui permet de renouer avec Francis Pagliaro, bien que l’inspecteur demeure un peu trop en retrait à mon goût dans ce livre. Mais je ne doute pas que les lecteurs qui ont apprécié L’Inaveu trouveront leur compte dans ce roman, qui m’a fait
passer un moment de lecture à la fois agréable et haletant.