lundi 30 juin 2014

Lectures : Frontière barbare


Serge Brussolo, Frontière barbare, Gallimard, collection Folio SF, 2013, 429 p.


Depuis quelques années, Serge Brussolo publie surtout des thrillers, notamment dans la série Agence 13, éditée en grand format au Fleuve noir. Un peu plus tôt en 2013, il a tout de même fait paraître La muraille interdite, tome 1 de la saga d’Almoha, chez Bragelonne (Milady). Ce récit de science-fiction laissait présager un retour plus assidu au genre. Hélas, le tome 2 est disponible uniquement en version électronique, pour une question de ventes jugées insatisfaisantes (pourtant, Brussolo a beaucoup d’aficionados...)  

 
En tant que fan de l’auteur, surtout de ses récits relevant des littératures de l’imaginaire, je me suis réjouie en apprenant la sortie de Frontière barbare, un inédit publié directement en format de poche. J’ai toutefois eu l’impression que le roman avait été écrit il y a un certain temps, même s’il est présenté comme une nouveauté, peut-être à l’époque de Vent noir (1991) ou de Capitaine suicide (1992), avec lesquels il possède certaines similitudes (la traversée dans le désert, la ville organique, la pyramide....). Mais, bien entendu, Frontière barbare ne se cantonne pas à reprendre les thématiques de ses prédécesseurs et innove entre autres par sa densité.

Assez long (l’histoire compte quand même 430 pages), Frontière barbare met en scène David Sarella, un exovétérinaire, c’est-à-dire un vétérinaire qui travaille auprès des animaux extra-terrestres. Sa principale tâche est de calmer les animaux agressifs, surtout lors des nombreux conflits armés (à ce sujet, une belle trouvaille de Brussolo : des peuples en guerre louent d’immenses appartements pare-balles pour régler leurs différends en espaces clos !)

Ula, sa compagne, l’escorte dans quelques-unes de ses « missions ». La jeune femme, dotée de gènes agressifs de Nouveaux-Vikings, une race belliqueuse, possède une nature guerrière fort développée. Ensemble, ils partent pour Mémoriana afin de pacifier les exomorphes sur le champ de bataille. C’est sans compter la personnalité d’Ula, qui a viscéralement besoin de violence... Ce personnage est l’une des réussites de Frontière barbare, convaincant et tridimensionnel, contrairement à certains des protagonistes, plus falots : Carmody, Ivana et même un peu David, que l’on souhaiterait parfois moins passif. Mais cela importe peu au final, car, comme dans la plupart des récits de Brussolo, l’inventivité demeure au rendez-vous, entre autres avec les « mange-morts », les « moineaux-rasoirs » et surtout l’étrangeté d’Ozataxa, la cité abandonnée (pour laquelle j’avoue, sans grandes surprises pour ceux qui me connaissent, avoir un faible).

Cependant, alors que je lis presque toujours d’une traite les romans de Brussolo, incapable de les déposer tant l’envie de découvrir la suite est irrépressible, ce phénomène ne s’est pas produit avec Frontière barbare. Peut-être est-ce imputable à l’approche picaresque du récit, qui enchaîne les péripéties, du moins dans sa première partie, sans liens apparents entre elles. Cette impression s’atténue toutefois après un drame qui touche de près le personnage principal, et qui confère à sa quête dans Ozataxa un fil conducteur plus solide. J’ai aussi eu l’impression que l’imagination de l’auteur était plus diluée dans ce récit, davantage ponctuelle, alors que Brussolo nous a habitués à des romans particulièrement déjantés. Quelques lecteurs pourraient par ailleurs être dérangés par l’approche scientifique du livre, qui prend beaucoup de libertés (amateurs de hard SF s’abstenir !).

Cela dit, j’ai apprécié de renouer avec l’imaginaire si personnel de Brussolo, et recommande Frontière barbare aux fervents de l’écrivain. Pour les lecteurs moins familiers avec l’auteur, souhaitant connaître son œuvre de SF et de fantastique, ce livre n’est pas le point de départ idéal. J’espère également que les éditeurs français n’hésiteront plus, comme Bragelonne, à publier les récits de cet écrivain majeur, à l’imaginaire sans pareil. Alors, si vous avez envie de vous aventurer sur les champs de bataille de Mémoriana, parmi d’étonnants exomorphes et des disciples de l’Église du Pardon Universel, Frontière barbare vous attend !


- Cette critique est parue précédemment dans le numéro 36 de Brins d'éternité.

mercredi 25 juin 2014

Itinéraire insulaire


Cet été, Frédérick et moi avons décidé de prendre nos vacances au tout début de la saison estivale, soit la semaine dernière. L'idée de voyager en autobus et à vélo dans l'une des rares régions du Québec que nous n'avions pas encore visitée nous apparaissait séduisante. En plus, comme l'autobus Les sillons offre le trajet jusqu'aux Îles de la Madeleine (une vingtaine d'heures, dont cinq sur la traverse Souris-Cap-aux-meules) à partir de Sainte-Foy, la proposition était particulièrement alléchante. Il nous suffisait de récupérer ensuite nos vélos à quelques mètres de l'auberge... Bien entendu, nous avons appris (un peu à nos dépens) qu'il fallait tenir compte des vents sur place, même si, contrairement à une croyance véhiculée, il ne vente pas constamment aux Îles. Mais quand il vente... Bref, ce fut un voyage vivifiant, qui en valait la peine (les Îles sont magnifiques et uniques en leur genre dans la province), ponctué de rencontres agréables et de panoramas photogéniques. Panoramas que nous avons essayé de capturer sur pellicule, dont voici un aperçu :

La première île que nous apercevons de la traverse Souris-Cap-aux-Meules, la bien nommée Île d'Entrée :

Le village de l'Étang-du-Nord : épave
 Le phare du Cap Hérissé, avec son atmosphère onirique
 La (aussi bien-nommée) Belle Anse
 Cap-aux-Meules (observatoire en haut de la colline et visages pétrifiés dans la pierre rougeâtre) :

Havre-Aubert un jour de grisaille, près du site de la Grave, à droite se trouvent les "buttes des Demoiselles"
Le coloré village de Havre-aux-maisons
Vue du chemin des Montants, sorte d'épreuve du feu pour cycliste :
La dune du Nord, un aperçu :
Dune qui, après des kilomètres et des kilomètres, se déroule jusqu'au hameau de Pointe-aux-loups
Ce que nous avons vu qui ressemble le plus à un loup :

Avant de reprendre la route en autobus le lendemain, alors que le jour se levait sur le village de Fatima :
Pour les curieux, quelques autres images se trouvent dans cet album : 


vendredi 20 juin 2014

Gore : dissection d'une collection



Alors que nous revenions tout juste des Îles de la Madeleine (dont je reparlerai prochainement !), un colis nous attendait, Frédérick et moi, contenant rien de moins que Gore : dissection d'une collection. Dirigé par David Didelot, qui signe d'ailleurs de nombreuses critiques, l'ouvrage impressionne avec ses 392 pages couleur sur papier glacé. Nul doute, Artus films, qui publie ici son premier livre, a souhaité donner ses lettres de noblesse à la collection et au genre de l'horreur au sens large ! De plus, je suis particulièrement fière d'avoir contribué à Gore : dissection d'une collection, à la suite de l'invitation de David Didelot (et des encouragements de Frédérick, qui me disait que, malgré mon horaire bien rempli à cette période - c'était l'époque de mon examen de synthèse -, je serais heureuse de figurer au sommaire). Et il avait bien raison, surtout en regard du résultat, d'un grand professionnalisme. 

Nous avons donc ici littéralement une "bible" sur cette collection du Fleuve Noir, qui a fait paraître 118 titres (+ 2 hors collection) entre 1985 et 1990, à laquelle ont pris part une vingtaine de collaborateurs. Au programme, des critiques de chaque roman, une histoire de la collection, des entretiens (notamment avec Daniel Riche, fondateur de Gore), des détails sur des titres non publiés, un panorama des "successeurs" de la collection (dont, bien entendu, Trash éditions et la Maison des viscères), un index chronologique... (mais pas d'index par titre et par auteur, par contre). 

Bref, Gore : dissection d'une collection est sans contredit un ouvrage de référence conçu avec soin, incontournable pour les aficionados de littérature horrifique au sens large ! En plus d'avoir été une expérience inoubliable (merci à David D. et à Frédérick de m'avoir permis de contribuer à ce livre somme).

Et, finalement, pour les curieux qui aimeraient en savoir davantage ou se procurer l'ouvrage : la fiche du livre sur le site de Artus films.