Solaris no 184, automne 2012
La revue
Solaris vient de faire paraître un numéro spécial
consacré à Isaac Asimov, à l’honneur cette année au festival
Québec en toutes lettres. Il s’agit d’un hommage particulièrement étoffé, puisque la majorité du
numéro regroupe des nouvelles et des articles sur l’auteur. La section rédactionnelle,
avec ses critiques de livres, se retrouve cette fois-ci dans
le volet en ligne. C'est donc une initiative à saluer, notamment par le sommaire alléchant
de ce numéro, qui propose des nouvelles et des hommages d’Alain Bergeron, Philippe-Aubert
Côté, Michel Lamontagne, Nando Michaud, Hugues Morin, Francine Pelletier, Mario
Tessier et Jean-Louis Trudel.
Le robot est à l’honneur dans la plupart des nouvelles,
qui s’intéressent à l’un des thèmes fétiches d’Asimov. Néanmoins, même si
j’aurais apprécié un peu plus de variété thématique, les auteurs font montre
d’originalité dans le traitement de la robotique.
Je retiens particulièrement « Dans les bras de
Murphy », de Nando Michaud, l’une des réussites de ce numéro. Dans ce
texte grinçant, au rythme soutenu, le narrateur revient d’un long exil au
service de Krypto Corp, une entreprise minière. Mais une succession
d’événements lui feront s’apercevoir que les choses ont particulièrement évolué
en son absence...
J'ai aussi apprécié « La race des seigneurs »,
de Jean-Louis Trudel, qui s’articule autour de Lynas Marois, un journaliste
d’enquête. Après avoir fait une découverte étonnante, au sujet d’une famille
impliquée dans le domaine bancaire depuis des décennies, Lynas fera la
rencontre imprévue d’Amalia Baker. Cette nouvelle au suspense réussi fait
montre d’une connaissance certaine d'Asimov, tout en confirmant le
talent de nouvelliste de Jean-Louis Trudel, gagnant du prix Solaris de l’an
dernier.
Quelques mots également sur « Le fantôme dans le
mécha », de Philippe-Aubert Côté, qui propose une variation originale et
surprenante sur le thème des robots. Dans ce texte soigneusement écrit, avec
une grande précision dans le style (malgré un tantinet trop d’adjectifs),
l’auteur nous présente Néolème, Rhupan et Théo, des robots unis par de solides
liens amicaux. Mais ils devront réfléchir sur la nature des liens qui les
unissent à mesure qu’ils feront certaines découvertes...
Bref, ce numéro de
Solaris, avec son sommaire des plus solides, est un incontournable
pour les amateurs de science-fiction québécoise de qualité,
a fortiori
pour les fans d’Asimov, qui y trouveront leur compte sans le moindre doute. Et
pour ceux qui hésitent encore à se procurer
Solaris, je vous rappelle
l’adresse de leur site, si vous avez envie d'aller fouiner de ce côté :
revue-solaris.com.
Alibis
no44, automne 2012
Pour l’automne 2012, la revue Alibis nous propose
un numéro « noir » avec pas moins de six nouvelles au sommaire, trois
articles et les habituelles critiques littéraires. Les fictions sont pour la
plupart signées par des auteurs bien connus des abonnés : Véronique
Bessens (gagnante du prix Alibis 2012), Jacques Côté (auteur entre autres de la
série « Les cahiers noirs de l’aliéniste »), André Jacques (auteur de
quelques nouvelles publiées dans Alibis), Peters Sellers (auteur et
anthologiste de renom) et Richard Sainte-Marie (gagnant du prix Alibis 2010 et
auteur du très réussi L’Inaveu). Nouvelle venue, Julie Racine se joint à
eux, par le biais d’un défi lancé par Zone d’écriture de Radio-Canada, dont
l’un des prix était la publication dans Alibis. Il en résulte un texte relativement anodin, qui semble un peu improvisé, avec un début prometteur qui tient plus ou
moins ses promesses. Mais penchons-nous plutôt sur les réussites de ce numéro, plus particulièrement sur mes trois nouvelles favorites.
Dans « Petite suite Hämmerli », Richard
Sainte-Marie met en scène l’un de ses personnages fétiches. Le style est ici savoureux,
de même que les protagonistes, particulièrement travaillés (une mention pour le gros Luce). L’intrigue, un peu
plus en retrait, est néanmoins intéressante, habilement scindée par des
mouvements musicaux.
Véronique Bessens, dans « Précautions d’isolement »,
renoue avec les thématiques glauques qui semblent constituer sa marque de
commerce (du moins, si je me fie à sa nouvelle publiée dans le précédent numéro d'Alibis). Il en résulte un texte dur, qui nous présente une accompagnatrice
d’aveugles qui a poussé dans l’escalier roulant l’homme dont elle avait la
charge. Quels sont les véritables motifs de son crime ? Immorale et délicieuse,
cette nouvelle nous offre une plongée audacieuse dans l’univers sordide de la protagoniste.
Je retiens aussi « Le nécrologiste », d’André
Jacques, un récit à l’humour noir et au rythme particulièrement réussi.
L’histoire s’articule autour de Jean-Philippe Camiré, médecin légiste en visite
à Lyon pour un congrès. Il y fera la rencontre d’un collectionneur des plus
singuliers, qui s’intéresse de près aux descendants des familles d’aristocrates
russes. Mais sa ferveur prendra d’étonnantes proportions, à mesure qu’il
décrit à Jean-Philippe l’ampleur de sa collection... Un récit à la fois
surprenant et amusant, qui reste longtemps en mémoire.
Trois articles aussi intéressants que variés (sur Alfred
Hitchcock, la traduction et Jean Féron) complètent cette livraison des plus
emballantes d’Alibis. Un numéro noir à souhait, avec des fictions
presque toutes solides et une section critique passionnante. Alors, si vous ne
connaissez pas Alibis, voilà l’occasion idéale de la découvrir !