Asile
no 06, hiver 2012, 54 p.
Cet
opus d'Asile se présente sous une couverture énigmatique, une œuvre de Samuel O’Breham
Rondeau, qui n’est pas sans évoquer une plaie ouverte. D’ailleurs, les
peintures de David B. Lachance qui illustrent plusieurs des fictions du numéro
vont également en ce sens, donnant le ton à cette livraison, sur laquelle plane
une certaine mélancolie.
Au programme, cinq textes, dont plusieurs à saveur
poétique. David Hébert ouvre le sommaire avec « La sixième Madone »,
un récit émouvant et décadent, dans lequel le narrateur s’éprend d’une jeune
femme sibylline, identique à la Madone d’Edward Munch. Peu à peu, il éprouvera
une forme de « délire meurtrier », qui s’exprimera à travers ses
rêves. Avec cette nouvelle à la voix personnelle, Hébert montre son potentiel,
qui s’exprime à travers l’un de ses thèmes fétiches : la quête d’une femme
inaccessible. Un auteur à suivre, qui publiera à l'automne son premier roman
aux éditions Sémaphore.
Le texte suivant, « Virus », de
Marie-Catherine Daniel, est disséminé en plusieurs parties dans la revue.
Erreur de montage ou jeu avant-gardiste ? Je pencherais pour le jeu, le virus
s’introduisant insidieusement entre chacun des récits, tel un parasite habile…
Quoi qu’il en soit, l’auteure nous présente ici, sous forme de prose poétique,
une nouvelle de science-fiction originale, à l’écriture litanique, caractérisée
par des phrases courtes. En quelque sorte, une littérature « anticorps »,
comme le suggère la dernière partie.
Deux poèmes de Florent Chamard poursuivent le
numéro. L’auteur français nous propose ici plusieurs beaux vers,
particulièrement dans « Adieu », ou l’on peut lire, par
exemple : « L’ennui est si violent quand vient l’heure de partir / Je
te dirai bien de te garder à distance / de ce rouage mouvant / au son des lois
de l’instant / des fantômes qui n’en savent rien / et qui te prieront de les rejoindre ».
Le nouvelliste suivant, sous le pseudonyme de
Simon-Samuel Nauchbauer, avec lequel il a déjà sévi dans la revue Alibis,
signe cette fois « Un », une nouvelle à teneur poétique. Dans ce
texte de science-fiction, où un grand souci est accordé à la forme, nous
faisons la connaissance d’un impitoyable président, qui règne sur un univers
totalitaire. À l’intérieur de ce monde qui se veut unifié, d’où le titre,
une modification génétique vise à ce que les visages des nouveau-nés soient
identiques à celui du président et de l’ensemble des habitants. Je salue cette
initiative réussie d’allier science-fiction et prose poétique, mélange trop peu
souvent mis de l’avant.
Alexandre Albert clôt le sommaire des fictions
avec une nouvelle à saveur fantaisiste, au sein de laquelle un enfant assiste à
un étrange spectacle nocturne. Ce texte, à l’écriture ciselée, est agréable à
lire, notamment grâce au soin accordé par l’auteur aux manifestations
sensorielles.
Un « cadavre exquis » complète cette
livraison d’Asile, signé par tous les auteurs du numéro. La rédaction
offre justement un abonnement gratuit à ceux qui sauront deviner qui a écrit –
dans l’ordre – chacune des parties. Relèverez-vous le défi ? Si oui,
rendez-vous sur le site du fanzine : a-s-i-l-e.blogspot.com
(Critique précédemment publiée dans le numéro 32 de la revue Brins d'éternité)
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