L’ABC
du gothique / Emmanuel Régniez
L’ABC du gothique est la première œuvre de fiction
publiée par Emmanuel Régniez, qui avait auparavant fait paraître Sakura,
un projet photographique. Ce livre publié au Quartanier avait tout pour
m’intriguer, puisqu’il se présente comme une sorte d’hommage au roman gothique.
Et il est incontestable qu’Emmanuel Régniez connaît à fond le genre, disséminant de nombreuses références sur ces romans au gré des pages.
L’ABC du gothique n’est pas un roman à proprement
parler. Il s’agit plutôt d’une forme de "collage", autour des fiches léguées au
narrateur par son meilleur ami, Simon Melmoth. Simon Melmoth (dont ce n’est
évidemment pas le vrai nom de famille) s’est en effet suicidé avec un fusil de
chasse, un jour de juillet, en léguant un abécédaire à son meilleur ami. Cet abécédaire,
c’est bien entendu L’ABC du gothique, auquel nous aurons accès. Entre
les citations gothiques et les définitions du genre, classées par ordre alphabétique,
nous découvrons aussi les réflexions du narrateur, dispersées entre les fiches.
De courts chapitres, qui traitent de sa relation avec Simon, sont aussi intercalés
dans l’abécédaire, de même que de brefs textes en prose, qui s’intitulent
« Fantaisies... ». Comme vous pouvez le constater, le travail sur la
forme est ici complexe, ce qui donne comme résultat une œuvre construite
par fragments, que le lecteur doit reconstituer.
Cependant, les amateurs de récits plus narratifs
pourraient être déçus par l’aspect « collage » de L’ABC
du gothique. En effet, par sa forme inusitée, ce livre peut autant séduire
que rebuter, selon qui l’aborde. Je me suis d’ailleurs interrogée sur l’intérêt
que l’abécédaire pourrait susciter chez un lecteur qui ne s'intéresse pas du tout au genre gothique (ou qui ne serait aucunement curieux de le découvrir). Toutefois,
pour une amatrice de romans gothiques comme je le suis, L’ABC du gothique
fut agréable à lire, truffé de références qui me rappelaient mes
meilleures lectures dans le genre. Car l’intertextualité prend une place importante
dans ce livre, qui ne présente malheureusement pas ses sources de façon
évidente. Même si je confesse que les notes de bas de page auraient un peu nui
à la lecture, il aurait été intéressant et facile de regrouper les sources à la fin du
livre, en leur donnant le numéro des fiches. Car, en l’état, le lecteur séduit
par un extrait n’a aucun moyen de retrouver le roman dont il est issu. Cela
dit, L’ABC du gothique saura certainement plaire aux amateurs de curiosités
gothiques, qui aurait envie de plonger dans un projet original, qui ne
ressemble à rien d’autre. Avis aux fervents de ruines et de souterrains hantés
!