Éric Gauthier, La grande mort de Mononc’ Morbide, Alire, 2015, 526 p.
La grande mort de Mononc’ Morbide est le cinquième
livre d’Éric Gauthier. À ce jour, l’auteur a publié trois romans et deux
recueils de contes. Fervent de fantastique, Éric Gauthier aime proposer des
récits qui allient son genre de prédilection à la fantasy urbaine. Son
dernier ouvrage est à cette image, les villes de Sherbrooke et de Montréal se
teintant d’étrangeté, voire d’une touche de magie.
La couverture éclatée du roman représente bien la folie créatrice qui anime Élise Lépine, l’héroïne du livre. Malchanceuse
depuis toujours, à l’instar de plusieurs membres de sa famille, Élise croit que
le vent est en train de tourner. En effet, elle vient de se faire offrir de participer
à la conception d’une fête privée, sous l’égide d’un très riche client. Toutefois,
la jeune femme doit veiller à surprendre le millionnaire Pierre Daigle, qui en
a vu d’autres. Élise ressent donc une certaine appréhension à l’idée de ce qui
l’attend. Elle décide alors de quitter Montréal un moment, afin d’aller chercher
l’inspiration à Sherbrooke auprès d’Edgar, son vieil oncle grincheux. Mais,
entre-temps, Edgar, comédien déchu de l’émission pour enfants La maisonnée,
s’est résolu à héberger un colocataire pour payer ses factures. Ce colocataire,
Steve, se révèle bientôt obsédé par La maisonnée, de plus en
plus obnubilé par l’idée de ramener Edgar sous les projecteurs, plus
spécifiquement dans son rôle de Mononc’ Morbide. Mieux, Élise et lui pourraient
lui donner un grand rôle dans la réception qu'organise la jeune femme. Car
Edgar est âgé, et Steve croit qu’il doit préparer sa « sortie de
scène » d’une manière mémorable.
Roman au fantastique minimaliste, La grande mort de Mononc’ Morbide est
un livre sympathique parsemé d’humour, qui se lit avec un sourire en coin. Les
personnages, qu'il s'agisse d'Élise, d'Edgar ou de Steve, sont particulièrement réussis,
leur psychologie étant finement dépeinte. Car, en fait, ce sont leurs
interactions qui constituent le cœur de cet ouvrage. Les fervents de
fantastique moins « modéré » pourraient donc demeurer sur leur faim,
notamment en ce qui a trait au dénouement de l’intrigue. Pour ma part, j’ai aimé
me laisser emporter par ces protagonistes réalistes à l’intérieur de cette
aventure simple, narrée de manière fluide et rythmée (les 200 dernières pages
contiennent néanmoins quelques longueurs... l’histoire totalise après tout 526
pages, ce qui est beaucoup).
Bref, Éric Gauthier nous offre, dans La grande mort de Mononc’
Morbide, un récit qui respire l’authenticité et l’humanité. Un roman qui
s’intéresse au côté modeste, spontané de la vie. À l’image d’Élise, en somme.
Isabelle Lauzon et
Nadine Bertholet, Allégeances (Clowns Vengeurs), Porte-Bonheur, 2015,
194 p.
Allégeances est le onzième « Clowns
vengeurs » à paraître aux éditions Porte-bonheur. C’est également le
deuxième titre de la nouvelle mouture de la collection, qui s’adresse désormais
aux adultes, en plus des adolescents. Pour ce faire, la série propose notamment
des ouvrages plus longs. C'est d'ailleurs la première fois dans la collection que deux
auteures s’unissent afin de nous offrir un même roman. L’histoire se décline en
deux parties assez différentes l’une de l’autre (ce qui laisse présager que
chacune d’entre elles a été rédigée dans un premier temps par l’une des
co-écrivaines). Le livre se présente sous une couverture assez réussie, qui
allie science-fiction et esthétique gothique. D’emblée, nous sentons
l’enthousiasme d’Isabelle Lauzon et de Nadine Bertholet, véritables érudites de
l’univers des Clowns vengeurs.
Nous faisons d’abord la rencontre de Deloan, nouvelle
recrue des menvatts. Contrairement à son frère Gayle, Deloan remet en question
certaines des techniques de l’ordre, dont il interroge la pertinence. Bien des
années plus tard, Deloan, devenu chef d’une importante section, aura à résoudre un cas particulier : celui d’Avner Lormax, un menvatt qui a engagé
une adjointe singulière. En effet, Sinda, à l’époque où elle était enfant, a vu
sa mère mourir au terme d’une poursuite mêlant menvatts et acurides. Fascinée
par les menvatts et avide de vengeance envers les acurides, Sinda profitera du
travail offert par Avner Lormax pour régler certains comptes personnels et familiaux.
Jusqu’à ce que sa « fascination » dépasse les bornes...
Agréable à lire, Allégeances propose des
personnages intéressants, au premier chef Sinda. La jeune adjointe est sans
contredit le personnage-clef du livre. En ce sens, il est dommage que Sinda
soit absente de la première partie du roman. La seconde partie, sans surprise, est
la plus prenante, avec ses descriptions glauques et ses scènes d’action bien rythmées.
En outre, la connaissance de l’univers des Odi-menvatts est
bien intégrée dans l’ensemble d’Allégeances, qui est l’un des tomes de
la série qui m’a paru le plus solide, réfléchi. Bref, nous sentons le soin
qu’Isabelle Lauzon et Nadine Bertholet ont mis à rédiger cet opus. Opus qui
fera passer un bon moment aux adeptes de sang noir !
Sinda, une "adjointe", hein? On dirait que je devine qui a créé ce personnage! ;)
RépondreSupprimerHéhé, disons que j'ai ma petite idée aussi ;)
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