Une maison de
fumée / François Lévesque
Depuis
2008, François Lévesque publie un roman par année, la plupart aux éditions
Alire. Une maison de fumée est donc son sixième livre en six ans, cet
opus-ci ne s’inscrivant pas dans une série, contrairement à la trilogie « Les
carnets de Francis », publiée entre 2009 et 2012. Peut-être vous
rappelez-vous aussi de L’esprit de la meute (2011), une incursion assez intéressante de
l’auteur dans le domaine du fantastique, que j’avais présentée l’an
dernier au « Voyage insolite ». J’étais donc curieuse de découvrir
cette nouvelle parution de François Lévesque, compte tenu de son titre énigmatique.
Comme
dans ses romans précédents, Lévesque manie l’art du suspense, et le lecteur s’attache
au sort des personnages. Cependant, puisque l’auteur remet en scène un
jeune homme tourmenté au passé et à la mémoire troubles, tel qu'il le faisait dans ses récits
précédents, le narrateur m’a moins convaincue, cette fois-ci.
J’ai eu l’impression que Lévesque restait dans sa « zone de confort »
avec le personnage de Dominic Chartier, policier au SPVM qui a oublié une
grande partie de son enfance. Il faut dire que des drames se sont produits à
Malacourt en 1982, dont un incendie qui a tué cruellement la mère de Dominic,
enseignante aimée de sa communauté. Mais ce n’est pas tout : les
villageois venaient de subir la disparition de deux fillettes,
vraisemblablement enlevées et tuées par le directeur de l’école, pédophile. Ce
dernier sera finalement condamné à la prison à perpétuité, et Dominic déménagera
loin des lieux du drame. Mais une autre disparition de fillette le ramènera à Malacourt,
vingt ans plus tard, et le policier fera enfin la lumière sur son passé...
D’emblée,
je dois dire que l’amnésie presque totale de Dominic pendant 20 ans m’a laissée un
peu perplexe, surtout le fait qu’il attende toutes ces années avant de chercher à
comprendre ce qui s’est passé. En plus, comme les événements en question sont
particulièrement dramatiques et que des sévices s’échelonnent sur plusieurs
années, comme nous l’apprenons à la fin du livre, la défaillance quasi-complète
de sa mémoire est difficile à admettre. Malgré la disparition de la
troisième fillette, je me suis demandé pourquoi avoir attendu deux
décennies avant de revenir au bercail. Mais j’ai décidé de jouer le jeu, le
fonctionnement de la mémoire étant parfois énigmatique (notamment le
processus du refoulement), même si j’ai trouvé que les révélations sur le passé
du policier « tombaient souvent à point ».
Cela
dit, le lecteur a quand même envie de savoir ce qu’a vécu Dominic et s’attache
au sort des personnages secondaires, bien construits, dont Vincent,
enquêteur à la Sûreté du Québec. Un bémol toutefois au sujet du style de
Lévesque, qui aurait parfois gagné à être allégé, par exemple des phrases
comme « la gardienne de ce dernier l’épiait sournoisement en feignant
justement d’être plongée dans la lecture de la Bible » ou « Se
félicitant probablement d’avoir choisi aussi judicieusement, Shana arqua les
épaules en frémissant ». Mais dans l’ensemble, la lecture est fluide, et le
rythme, constant.
Bref,
Une maison de fumée est un roman sympathique, même si François Lévesque
reste ici en terrain familier. Avis aux lecteurs qui aiment les récits
policiers introspectifs et tourmentés.
Je ne suis pas particulièrement attiré par le style de F.Levesque, justement à cause, comme vous, des bémols qui alourdissent ses récits.
RépondreSupprimerEt comme le style est important pour créer des atmosphères noires à souhait... Cela dit, je suis certaine que, s'il le souhait, François Lévesque pourrait perfectionner son style dans ses prochains livres... Et ses histoires (déjà intéressantes) s'en trouveraient forcément enrichies, plus immersives :)
RépondreSupprimerMerci de votre passage ici, Jacques !